Le terme conception inclusive (ou « design inclusif ») peut vous sembler familier, mais il est possible que vous ne connaissiez pas sa définition. Selon l’Université de Cambridge, la conception inclusive met l’accent sur la contribution de la compréhension de la diversité des utilisateurs et des utilisatrices pour éclairer ses décisions et pour inclure le plus de personnes possible.
La diversité des utilisateurs couvre la variation des capacités, des besoins et des aspirations. De plus, elle considère l’être humain dans son ensemble. En effet, elle prend en compte toutes les disparités qui pourraient diviser les individus dans le but d’éviter leur exclusion.

Comment adopter une conception inclusive ?
Pour adopter une conception inclusive, il faut respecter quelques éléments importants, dont : l’accessibilité des interfaces, la rédaction UX, la simplicité et l’inclusion dans les formulaires, les éléments visuels, ainsi que l’éthique et la bienveillance.
Accessibilité des interfaces
L’accessibilité des interfaces est un des piliers de la conception inclusive en plus d’être une priorité pour le W3C (World Wide Web Consortium). En effet, si on prend, par exemple, le « Web Accessibility Initiative – Accessible Rich Internet Applications » (WAI-ARIA), il s’agit d’une spécification publiée par le W3C qui fournit une sémantique permettant aux auteurs de transmettre les comportements de l’interface utilisateur et les informations structurelles aux technologies d’assistance (telles que les lecteurs d’écran). ARIA fournit plusieurs rôles, états et propriétés qui définissent les éléments d’interface utilisateur accessibles.
Avant de commencer à créer une interface accessible, il est important de réfléchir de quelle manière les éléments affichés à l’écran affecteront l’expérience utilisateur. Il est donc important de penser à quelques domaines spécifiques :
- Expérience visuelle :
- Englobe les formes, les couleurs, les contrastes, la taille du texte et les parties graphiques de l’interface.
- Expérience auditive :
- Couvre les sons produits par le produit ou le support, ainsi que leur volume et leur clarté.
- Expérience de pensée :
- Concerne le temps qu’un utilisateur doit passer pour interpréter l’interface, l’attention qu’il doit accorder et le niveau d’expérience nécessaire pour utiliser confortablement un produit.
- Expérience de portée et de dextérité :
- Tiens compte du type d’activités de mouvement qu’un utilisateur doit effectuer pour interagir avec un produit.
D’autres éléments peuvent fournir une meilleure accessibilité aux interfaces, dont :
- Rendre le site Web responsive (adapté à tous types de tailles d’écrans) ;
- Bien ajuster les couleurs et les contrastes et ne pas utiliser trop de couleurs dans l’interface (Webaim permet notamment de vérifier le contraste de couleur) ;
- Rendre l’interface compatible avec les technologies d’assistance ;
- S’assurer que les fichiers multimédias sont bien visibles et efficaces (ex. : créer des légendes sous chaque image).

Rédaction UX
La rédaction UX fait référence à l’écriture centrée sur l’expérience des utilisateurs. Le but est de rédiger du contenu selon les besoins et les objectifs des utilisateurs. La rédaction UX inclut notamment :
- Du texte visible avec les étiquettes des éléments de l’interface utilisateur, le texte des boutons, les liens et les formulaires ;
- Des descriptions non visibles qui n’apparaissent pas à l’écran (ex. : du texte alternatif pour les images) ;
- Tout autre élément qu’une personne peut lire à l’intérieur d’un produit.
Certaines personnes ont le français comme langue seconde. D’autres personnes préfèrent rendre leur taille de police très grande. D’autres ont des troubles cognitifs, ou un vocabulaire limité, ou certaines difficultés à la compréhension de certains mots. Bref, la rédaction UX fait partie intégrante de la conception inclusive. Elle est un moyen de rappeler aux personnes que peu importe qui ils ou elles sont, celles-ci ont leur place dans l’univers numérique.
Par ailleurs, le contenu écrit par le rédacteur UX doit surtout :
- Être simple, clair et concis ;
- Ne pas contenir de phrases trop longues et trop compliquées ;
- Ne pas être des phrases genrées (l’utilisation du texte de remplacement neutre est de mise) ;
- Être aisément lu et facilement utilisable ;
- Ne pas être dans de longs blocs de textes
- Être accessible pour tout type d’utilisateur.
Pour plus de détails concernant ce sujet, vous pouvez consulter notre article sur la rédaction UX.

Simplicité et inclusion dans les formulaires
Il est parfois nécessaire de demander des informations personnelles aux internautes (l’âge, le sexe, le genre, etc.). Malheureusement, ce type de données peut diminuer la portée inclusive des formulaires. Il est alors nécessaire de bien les concevoir afin qu’ils s’inscrivent dans une démarche de conception inclusive. Il y a certaines bonnes pratiques, dont :
- Vérifier si toutes les questions sont réellement nécessaires au formulaire :
- Mettre des questions optionnelles, au besoin.
- Réfléchir à la meilleure façon de poser les questions afin d’éviter d’exclure des personnes :
- Lorsqu’une question personnelle est posée (ex. : statut matrimonial, sexe, etc.), l’idéal est d’utiliser les expressions « Non répertorié » ou « Auto-description » (le concepteur reconnaît que des options supplémentaires sont valides)
- Expliquer pourquoi ces questions sont posées et à quoi servent les réponses :
- Lors de la collecte de données personnelles sensibles, il est important d’indiquer la raison pour laquelle ces informations sont demandées, en plus de préciser les détails sur la manière dont celles-ci seront utilisées et partagées.
- Ne pas montrer un ensemble limité de réponses :
- Mettre seulement « homme » ou « femme » comme identité de genre exclut les individus non binaires qui peuvent s’identifier à d’autres genres. Il est donc essentiel de donner l’opportunité aux internautes de s’exprimer en mettant plus de genres.
Par ailleurs, les formulaires avec une bordure contrastée aident grandement les utilisateurs du clavier à naviguer avec la touche de tabulation (« Tab »). Il est aussi important que chaque boîte de dialogue du formulaire soit étiquetée et contient notamment du texte qui explique la fonction du formulaire (ex. : mettre le mot « Rechercher sur ce site » dans la boîte de dialogue).

Utilisation d’éléments visuels inclusifs
Les icônes, les illustrations, les images et les photos sont des éléments visuels qui peuvent être exclusifs malgré eux. Pour entrer dans une démarche de conception inclusive, il est important de soigner chaque élément graphique afin qu’il soit adapté au plus grand nombre possible.
Par exemple, il est commun de représenter un homme avec des cheveux courts et une barbe. Cependant cette représentation peut ne pas correspondre à tous les hommes, puisque certains d’entre eux ont les cheveux longs et n’ont pas de barbe. Dans une démarche de conception inclusive, il est pertinent de s’éloigner des stéréotypes sociaux quant à la représentation des individus.
Les emojis d’Apple sont justement adaptés pour éviter des problèmes de conception inclusive. En effet, on peut retrouver un emoji d’une personne âgée de différentes couleurs, ce qui représente diverses réalités en plus de s’éloigner des stéréotypes sociaux. De plus, ils sont adaptés pour les personnes en situation de handicap, ainsi que pour les distinctions sociales, religieuses et culturelles. En effet, on peut retrouver des emojis qui s’inspirent des personnes faisant partie de ces différents groupes sociaux.
Également, il est essentiel de ne pas utiliser uniquement la couleur pour indiquer le statut ou l’intention. Par exemple, les erreurs sur les formulaires sont généralement surlignées en rouge. Pour certains utilisateurs daltoniens, ces erreurs semblent identiques à toutes les autres informations du formulaire. Une meilleure solution serait d’utiliser plusieurs différenciateurs, telle qu’une icône d’erreur, un texte plus gras, une couleur d’arrière-plan sur le message d’erreur lui-même, etc.

L’éthique et la bienveillance
La conception inclusive est une démarche humaniste. Ainsi, il est essentiel de penser l’expérience utilisateur avant tout et d’éviter les éléments qui pourraient être perçus comme agressifs. L’un des exemples qui reviennent souvent, c’est l’utilisation abusive des pop-ups. Dans son livre « Inclusive Design for a Digital World », l’auteure Regine M. Gilbert affirme que plusieurs entreprises estiment que celles-ci sont utiles pour la collecte d’adresses courriel. Toutefois, l’ennui avec les pop-ups, c’est qu’ils interrompent ce que l’utilisateur était en train de faire. Parfois même, des utilisateurs ont de la difficulté à fermer la fenêtre intrusive où se situe le pop-up.
Il existe des options que les concepteurs doivent utiliser afin de permettre à ce que les utilisateurs puissent bel et bien fermer les pop-ups sans trop chercher. L’utilisation de contraste de couleur approprié peut être une option afin de bien distinguer l’arrière-plan (le contenu du pop-up) et l’avant-plan (l’élément qui permet de fermer ce pop-up).
La conception inclusive ne consiste pas seulement à mesurer la façon dont les personnes en situation de handicap sont traitées par rapport aux personnes qui ne se retrouvent pas dans cette situation. Elle consiste surtout dans la façon dont sont traités les différents groupes de personnes faisant partie de la diversité capacitaire par opposition à d’autres groupes de personnes ayant des handicaps différents. Les concepteurs doivent user de bienveillance en prévenant les problèmes auxquels les utilisateurs pourraient faire face, en plus de trouver la meilleure façon pour empêcher le produit de discriminer des utilisateurs. Par exemple, si des modifications ont été apportées au site Web pour faciliter la navigation dans l’interface utilisateur pour les utilisateurs de lecteurs d’écran, il faut que les utilisateurs qui utilisent un agrandisseur d’écran puissent accéder à la même fonctionnalité.

Conclusion concernant la conception inclusive
La conception inclusive devrait être un élément essentiel à prendre en compte dans le processus de réflexion de tout type de concepteur. Avant d’imaginer et d’incorporer quelques types de fonctionnalités que ce soit, il serait davantage utile d’intégrer des éléments qui faciliteront l’usage que les utilisateurs en font, et ainsi aider à la compréhension des interfaces afin de les rendre plus accessibles.
Il existe plusieurs outils qui peuvent aider à faire de la conception inclusive. D’abord, le gouvernement de l’Ontario a mis à la disposition du public une trousse d’information sur la conception inclusive qui aide à créer de meilleurs services plus inclusifs pour tous. Il y a aussi le Centre de Recherche pour une Conception Inclusive de l’Université de l’École d’art et de design de l’Ontario, qui a mis sur pied un guide pour une conception inclusive. Il y a également le « Microsoft Design’s Inclusive Design Toolkit », une ressource utile pour toute personne qui travaille dans le développement de produits ou de la gestion et de la création de contenu.

Sources :
- Qu’est-ce que le design inclusif ? Définition et exemples
- How to Create Interfaces that Benefit All: Accessibility Testing and Inclusive Design Principles
- Inclusive UX writing
- 6 quick tips for designing inclusive forms
- Design Inclusive Visuals: Images, Icons, and Color
- Ethical design and accessibility